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Des neurones cultivés en laboratoire doués « d’intelligence »

 

Des neurones cultivés en laboratoire ont réussi à jouer au jeu Pong. C’est ce que révèle une étude scientifique publiée par la revue Nature. Si cette prouesse ouvre le champ des possibles, elle interroge néanmoins sur la notion même d’intelligence.

Environ 800.000 neurones prélevés

Toujours plus insolite ! Après les cochons, les singes et l’intelligence artificielle, c’est au tour de cellules humaines de relever le défi du Pong. Selon la revue Nature, des scientifiques australiens sont parvenus à faire jouer, au célèbre jeu d’arcade, des neurones cultivés en laboratoire. Ces organismes auraient fait preuve d’un comportement intelligent.

Pour leur expérience, les chercheurs en neurosciences ont prélevé des tissus de cerveaux embryonnaires de souris et de cellules souches d’humains. Au total, l’amas d’organes cellulaires, nommé « Dish Brain » se composait d’environ 800.000 neurones, la taille du cerveau d’un bourdon. Les scientifiques ont cultivé ces cellules dans une boîte de Pétri à l’aide de matrices de microélectrodes capables de détecter leur activité et de les stimuler. Ils les ont ensuite reliées à une reconstitution virtuelle du jeu Pong, dans lequel elles jouaient le rôle de la raquette.

Un système basé sur le « principe de l’énergie libre »

Les neurones devaient répondre à des signaux électriques circulant dans les électrodes pour déplacer une palette verticale afin de faire rebondir une balle virtuelle sur un mur. Ces signaux indiquaient l’emplacement de la balle à un moment donné (à gauche ou à droite). Leur fréquence augmentait ou diminuait aussi pour indiquer la distance séparant les cellules joueuses de la raquette. Les cultures cellulaires étant dépourvues de système dopaminergique, les chercheurs n’ont pas pu utiliser l’approche récompense/punition pour entraîner le DishBrain.

Ils ont plutôt opté pour le « principe de l’énergie libre », qui impliquent que les neurones minimisent l’imprévisibilité de leur environnement. Ainsi, quand les cellules arrivaient à renvoyer la balle, le système envoyait un signal prévisible indiquant qu’elles avaient réussi. A l’inverse, lorsqu’elles rataient leur coup, le stimulus reçu était aléatoire et imprévisible. Ce qui était rare puisque les neurones, soucieux de contrôler leur environnement, faisaient tout pour taper le plus possible dans la balle, afin de recevoir toujours le même signal.

Vers la création d’ordinateurs biologiques ?

Grâce à cette méthode, le DishBrain a appris à jouer à Pong en cinq minutes seulement. Pour Brett Kagan, directeur scientifique de la société Cortical Labs et co-auteur de l’étude, ce travail constitue une preuve que des neurones dans une boîte peuvent apprendre et montrer des signes élémentaires d’intelligence. Selon lui, il ne faut pas penser « à eux comme à des processeurs d’information », mais comme « de fabuleux systèmes capables de traiter des informations en temps réel en consommant très peu d’énergie ».

Adeel Razi, un autre auteur de l’étude, estime pour sa part que les résultats ouvrent de « nouvelles possibilités qui auront des impacts considérables pour la technologie, la santé et la société en général ». Il pense qu’on pourrait, par exemple, utiliser un jour ce genre de mini cerveau pour traiter des informations plus larges et remplacer les ordinateurs. Ou tester l’effet potentiel d’un nouveau médicament sur la fonction neuronale. DishBrain soulève toutefois des questions éthiques. Mais Brett Kagan rassure que les cellules cultivées ne montrent aucun signe de conscience, encore moins d’intelligence véritable.

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