Les « moais », ces gigantesques statues de l’île de Pâques, font partie des structures millénaires humaines les plus intrigantes. Elles cachent encore beaucoup de secrets malgré de nombreuses recherches menées depuis leur découverte au début du XVIIIe siècle. Un anthropologue américain de l’université de Binghamton croit avoir résolu quelques-uns de ces mystères, notamment la technique de construction.
Découvertes en 1722 par le navigateur néerlandais Jakob Roggeveen, les moais, ces statues monumentales de l’Île de Pâques (Rapa Nui), continuent d’interroger la communauté scientifique malgré de nombreux travaux menés sur le site. Les scientifiques se demandent notamment comment elles ont été construites et transportées. Mais un archéologue américain croit le savoir. Son équipe a exploité des images de drones et des relevés numériques inédits pour émettre des hypothèses.
L’équipe de recherche a étudié un millier de photographies aériennes du site des moais
En janvier 2024, suite à un incendie qui a ravagé le site des moais sur l’île de Pâques en octobre 2023, Carl Lipo, professeur d’anthropologie à l’université de Binghamton (Etats-Unis) et son équipe ont été sollicités pour conduire des recherches visant à assurer un avenir à ces monuments. Ils devaient principalement documenter la carrière, au cas où elle serait définitivement endommagée. Dans le cadre de leur travail, les chercheurs ont étudié un millier de photos aériennes prises par un drone ainsi que des relevés numériques inédits. Ils ont créé un modèle 3D complet à partir de ces clichés, pour mettre en lumière la production des statues.
Les moais ont été façonnées par des groupes sociaux indépendants
Grâce à leur cartographie, les scientifiques ont pu identifier trois techniques principales de taille dans la carrière : le façonnage du visage avant le corps, l’extraction en bloc et la sculpture latérale dans la paroi rocheuse. Selon eux, ces différentes méthodes suggèrent que les mégalithes ont été façonnées par des groupes sociaux indépendants.
Ces tribus auraient toutefois entretenu des échanges constants et partagé un cadre culturel commun, sans qu’une autorité supérieure n’impose de directives. Ce qui laisse penser que les Rapa Nui ont formé une société décentralisée. Une telle hypothèse n’est pas nouvelle. Elle a déjà été émise par des sources ethnographiques, qui évoquent une île organisée en petits clans, chacun doté de ses propres territoires et de ses lieux cérémoniels.
Une quarantaine de personnes auraient pu déplacer sur 10 km un colosse de 20 tonnes
Carl Lipo et ses collègues pensent également que les moais ont été conçues pour être déplacées par des clans familiaux indépendants. Ils justifient leur théorie par la forme de ces statues monumentales, présentant une large base en forme de D et une inclinaison vers l’avant. Cette forme permettrait de les faire se balancer latéralement grâce à des cordes, simulant ainsi la marche. Carl Lipo estime que le déplacement d’un moai ne nécessitait pas beaucoup de personnes.
Des tests menés par son équipe démontreraient que 18 individus répartis sur trois cordes pouvaient mouvoir une réplique de plus de 4 tonnes sur une centaine de mètres, et en quarante minutes. L’archéologue a également calculé qu’une quarantaine de personnes auraient pu déplacer sur 10 km un colosse de 20 tonnes. Mais il ne s’agit que de simulations. Et certains remettent en cause l’idée d’une société Rapa Nui décentralisée.
