La plateforme de distribution en ligne britannique, Ocado, a officialisé un partenariat historique avec le géant américain de la distribution Kroger. Après avoir convaincu le groupe de Jean-Charles Naouri, Ocado s’ouvre pour la première fois les portes du marché américain.
L’annonce de ce partenariat vient confirmer les performances d’Ocado, dont l’expertise en termes de livraison alimentaire en fait l’un des meilleurs dispositifs au monde. Elle a déjà eu pour conséquence une forte hausse des actions du groupe anglais, qui ont augmenté de 105% depuis le début de l’année.
Jeudi 17 mai, les dirigeants des groupes Ocado et Kroger ont annoncé un partenariat concernant l’utilisation sur le territoire américain de la technologie de livraison alimentaire développée par Ocado, l’OSP (Ocado Smart Platform).
Un partenariat d’envergure peu risqué
Si les détails de cet accord n’ont pas encore été tous rendus publics, ses grandes lignes sont désormais connues. Dans un premier temps, les deux groupes vont identifier 3 sites où seront installés les entrepôts automatisés d’Ocado. L’accord prévoit ensuite l’installation de 20 entrepôts de ce type sur le territoire américain au cours des trois prochaines années.
Parallèlement, Kroger entrera au capital d’Ocado à hauteur de 5%, pour un investissement estimé autour de 183 millions de livres sterling.
Ce partenariat marque une grande étape dans la croissance d’Ocado, puisqu’il lui permet de se déployer aux Etats-Unis, premier marché mondial de la distribution alimentaire, tout en bénéficiant de l’expérience du numéro 2 du secteur (122 milliards de dollars de CA en 2017).
En outre, de l’avis des experts financiers, cet accord n’implique que peu de risques pour Ocado. Kroger s‘est même engagé à dédommager le groupe s’il ne parvient pas à atteindre l’objectif des 20 centres de distribution installés dans les trois prochaines années.
Surtout, l’achat des 5% des parts d’Ocado se fera via une augmentation du capital pour laquelle Ocado ne devrait pas avoir besoin de faire appel au marché. Les dirigeants britanniques se sont dits « assez optimistes » sur la capacité du groupe à autofinancer les coûts des investissements liés à ce partenariat.
La capacité d’investissement évaluée autour de 300 millions d’euros, grâce à l’apport de liquidité de la participation de Kroger et à la levée de fonds réalisée au début de l’année 2018, permet de « dérisquer » le déploiement d’Odaco aux Etats-Unis, selon Barclays et Jefferies.
« Nous pensons qu’il s’agit tout simplement de l’accord le plus positif qu’Ocado pouvait annoncer. […] La société dispose désormais d’un partenaire extrêmement crédible sur le plus gros marché de la grande consommation au monde », ont déclaré les analystes de Barclays.
Ocado : la consécration
Comment expliquer qu’Ocado soit parvenu à signer un accord aussi favorable, étant donné les habitudes de négociations féroces des groupes américains ? En effet, les Américains ne sont pas connus pour faire des cadeaux : ils acceptent ces conditions très avantageuses pour Ocado car ils savent que l’expertise de pointe du groupe en matière de distribution alimentaire est l’une des meilleures au monde.
En signant ce partenariat, Ocado franchit un énorme cap, mais Kroger va bénéficier de son côté d’un savoir-faire innovant qui va lui apporter une longueur d’avance sur ses concurrents. Un atout non négligeable dans un contexte de révolution des habitudes de consommation, où les distributeurs jouent leur avenir sur leur capacité à s’adapter à ces nouvelles mœurs.
En France, la qualité de ce dispositif n’avait d’ailleurs pas échappé au PDG du groupe Casino, Jean-Charles Naouri. Il s’est montré précurseur en pariant le premier sur Ocado, dont il avait senti le potentiel et avec qui il avait conclu un accord dès le mois de novembre 2017. Ce deal permettra en premier lieu à Monoprix de livrer les aliments dès 2019, puis pourrait bénéficier aux autres enseignes du Groupe. La fameuse plateforme OSP sera développée dans un entrepôt à Fleury-Mérogis (Essonne), dont la construction vient de commencer.
Cette collaboration initiale a permis à Ocado de se faire remarquer et à Casino de se placer en avant-garde de la livraison alimentaire en France. Elle avait ainsi ouvert la porte à Ocado pour signer d’autres partenariats d‘envergure : avec le canadien Sobeys en janvier 2018, le suédois ICA au début du mois de mai et désormais Kroger, qui marque la consécration du groupe britannique.
Si l’accord initial avec le groupe Casino a permis de mettre en lumière l’entreprise et lui a ouvert les portes pour se développer avec d’autres partenaires, ses modalités ont aussi servi de base aux autres partenariats conclus depuis.